Des manières et conditions que doit remplir celui qu’on veut instruire à être bon veneur

Que tu sois grand seigneur ou petit, si tu veux faire instruire un homme pour qu’il devienne bon veneur, choisis d’abord un enfant de sept ans tout au plus, et, comme bien des gens me pourraient blâmer de mettre au travail des chiens un enfant si jeune, je leur réponds que les qualités naturelles s’altèrent et diminuent avec le temps, car on n’ignore pas qu’un enfant d’aujourd’hui sait plus de ce qui lui plaît, ou dont on l’instruit, dès l’âge de sept ans, qu’il n’en savait de mon temps à l’âge de douze ans. C’est pourquoi je veux le mettre si jeune à l’ouvrage, car un métier requiert toute la vie d’un homme avant qu’il y soit parfait; c’est pourquoi l’on dit : « Ce qu’on apprend dans sa jeunesse, on le retient dans sa vieillesse. » Il faut, en outre, à cet enfant beaucoup de choses : et d’abord un bon maître qui ait l’amour et le goût des chiens, qui, pour l’instruire, le batte quand il n’obéira pas, afin qu’il hésite à faillir. En premier lieu je veux lui apprendre et donner par écrit tous les noms des chiens et lices du chenil, jusqu’à ce que l’enfant les connaisse de poil et de nom; après je veux lui apprendre à nettoyer chaque matin le chenil de toutes ordures; après je veux lui apprendre à mettre de l’eau fraîche deux fois par jour, matin et soir, dans le vase où les chiens boiront, et que cette eau soit claire et nette, de fontaine ou de ruisseau courant; après je veux lui apprendre à remuer la litière où les chiens gisent, tous les trois jours, en la mettant sens dessus dessous; après je veux lui apprendre à vider et bien nettoyer une fois par semaine le chenil et sa litière et à remettre une litière neuve, propre et blanche, abondante et bien épaisse. Et l’endroit où il la déposera, où les chiens coucheront, doit être fait de bois, pour que l’humidité de la terre ne fasse pas souffrir les chiens; ce plancher doit s’élever à un pied de hauteur et l’on étend la paille dessus.