Du chien d’oiseaux et de sa nature

Il y a une autre espèce de chiens qu’on appelle chiens d’oiseaux et épagneuls, parce que cette espèce vient d’Espagne, bien qu’il y en ait en d’autres pays. Ces chiens ont beaucoup de bonnes coutumes et de mauvaises aussi. Le beau chien d’oiseaux doit avoir grosse tête et grand corps et beau poil blanc ou tacheté, car ce sont les plus beaux, et de ce poil il y en a plus volontiers de bons. Et il ne doit pas être trop velu et doit avoir la queue épaisse. Les bonnes coutumes que ces chiens ont sont qu’ils aiment bien leurs maîtres et les suivent sans les perdre parmi toute gent; aussi vont-ils volontiers toujours devant, quérant et jouant de la queue et rencontrant toutes sortes d’oiseaux et d’autres bêtes. Mais leur spécialité est la perdrix et la caille. C’est très bonne chose à un homme qui a bon autour ou faucon, lanier ou sacre pour la perdrix, que tel chien, et aussi pour celui qui a bon épervier, ils sont bons pour le gibier, et aussi, quand on leur apprend à être couchants, ils sont bons pour prendre les perdrix et les cailles au filet. Ils sont bons aussi quand on leur apprend la chasse en rivière avec un oiseau qui est au plongé. Mais, par contre, ils ont autant de vilains défauts que le pays d’où ils proviennent, car le pays influe sur les trois natures d’hommes, de bêtes et d’oiseaux. Et comme on dit lévrier de Bretagne, les chiens d’oiseaux viennent d’Espagne, et leur nature est déterminée par leur mauvaise origine. Les chiens d’oiseaux sont querelleurs et grands aboyeurs, et si vous chassez aux chiens courants n’importe quelle bête et qu’il y ait des épagneuls, ils vous la feront manquer, car ils se veulent mettre devant et vont çà et là, aussi bien à tort qu’à droit, et ils emmènent tous les chiens à leur suite et les font mettre en défaut. Aussi, si un limier fait sa poursuite et qu’il y ait un chien d’oiseaux, celui-ci voudra aussitôt se mettre devant, fera hésiter le limier et l’entraînera hors de ses pistes. Et si vous menez avec vous des lévriers et qu’il y ait un chien d’oiseaux, s’il aperçoit des chèvres, des oies, des poules ou un boeuf, il se mettra sur-le-champ à aboyer et à chasser, et il fera tant que tous les chiens et lévriers viendront là prendre la bête à sa requête, car il fera tout le tumulte, tout le bruit et tout le mal. Les chiens d’oiseaux ont tant d’autres défauts que, si je n’avais l’autour au poing, le faucon ou l’épervier, je n’en voudrais jamais avoir.